Motorisation de la grue
de quai Jouef
(article paru dans Loco Revue n°848, Mars 2018)
Ouai... les grues j'aime bien... surtout quand elles bougent
toutes seules !
Au sommaire de cet article :
Et si on faisait encore mieux? => voir une solution encore plus propre... en bas de page
Cahier des
charges :
Au club nous avions pour projet d'installer la grue de quai Jouef.
Bonne idée en soi, mais encore meilleure quand on peut contrôler ses
mouvements à distance.
Sur cette grue, il y a 2 actions possibles : La rotation autour de
l'axe vertical et la montée/descente du crochet.
Accessoirement, les tambours d'enroulement de la chaîne peuvent bouger
de façon synchrone avec la chaîne. C'est séduisant... . Certains m'ont
même proposé d'accrocher un p'tit bonhomme sur la manivelle...
Heuuuuu.... y'a pas marqué "la poste" là, ok
? On va faire ce qu'on
peut avec le temps qu'on a pour étudier la chose mais c'est sans
garantie.
Alors je me suis attelé à la tâche et j'ai motorisé le bidule.
J'ai d'abord démonté l'essentiel des éléments :

Je constate que :
- la rotation se fait
plastique
contre plastique. C'est bien pour une grue statique mais pas génial
pour un élément motorisé qui est supposé tourner toute la journée en
expo. Donc à revoir
.
- La fixation du corps sur l'embase se fait par un clipsage. Ce
clipsage est bien ennuyeux car il est sur l'axe et va empécher le
passage de la chaîne. Et le maintien en position est à reconcevoir. Ca va pas être facile pour faire un axe démontable.
- Le crochet est en plastique (donc trop léger) et sa poulie ne
tourne pas. ==> à revoir 
- Bon point : La chaîne est très souple et la poulie située à
l'extrémité de la
flèche peut tourner. En revanche, les 3 poulies intermédiaires sont
fixes et la chaîne devra être guidée sur celles-ci car elle a carrément
tendance à s'échapper des guides.
Voilà qui promet d'être passionnant !
Héloïse . [h.m.jourdain@gmail.com]
D'abord,
on imagine et on schématise :
Fort de ces constatations, j'ai imaginé un principe de solution pour
transmettre les mouvements souhaités :
- Plutôt que d'enrouler la
chaîne sur le tambour principal
(impossible à motoriser), je choisis d'enrouler celle-ci sur un axe
situé sous la table.
- Et tant qu'à faire autant placer tout les moteurs sur un même
sous-ensemble.
Ce qui me donne ceci :

Dans cette solution, le cadre (gris) qui porte les moteurs est mobile. Il suit
la rotation de la grue.
En soi, c'est simple, mais quand on regarde chaque liaison (pivots ou
encastrements) ça devient vite casse-tête. Surtout l'articulation
corps-embase...qui risque fort de devenir indémontable...
J'ai volontairement choisi des transmissions par courroie afin de
limiter naturellement l'effort sur la chaîne : En cas d'oubli en
marche (si si ça arrive!), le moteur peut continuer à tourner
indéfiniment sans détruire l'ensemble de la grue.
Une poulie
pas chère pour la chaîne :
Concernant l'axe d'enroulement, j'ai utilisé un vieil essieux Jouef,
qui présente l'immense intérêt de présenter un boudin énorme.... très
pratique pour une poulie !

1- Je retourne les roues pour
placer les boudins à l'extérieur.
2- Je fais glisser l'une des deux roues contre l'autre, à une extrémité
de
l'axe. Je les colle ensemble sur l'axe. Je meule les pointes de l'axe.
3- Je coupe l'axe en deux parties de longueurs égales.
4- Je colle la
chute de l'axe d'essieu (sans roues) à l'intérieur du tube en laiton
(tube 4mm*ép 1mm) en veillant à laisser dépasser 1.5mm d'axe au bout.
Le tube doit avoir la même longueur que le moteur M2 afin de tenir pile
poil entre les deux flancs des circuits imprimés. Puis, en place,
j'insère (en force) l'autre moitié de l'axe (avec les roues) au travers du CI, en
prenant soin de laisser un jeu axial.
Le bâti
mobile :
Je me lance en premier lieu dans la confection du cadre mobile. C'est
un prototype, ne m'en veuillez pas pour les tâtonnements et les
découpages "à l'arrache" :
Il est composé de 3 chutes de circuit imprimé de 12mm de large. Les
longueurs varient entre 40 et 70mm.

Dans ces morceaux de C.I., je perce des trous au diamètre 4mm pour les
axes des moteurs.
En superposant les deux morceaux latéraux, cela permet de percer les
trous bien en face. (moteur : diam 4mm, axe d'enroulement : diam 2mm)
J'ai utilisé les vis de fixation du réducteur, mais
au final, je conseille plutôt d'acheter des vis M1.6*4 qui seront plus
faciles à utiliser, car le réducteur possède des taraudages M1.6 libres.
Dans le morceau du dessus, on perce un trou au diamètre 5mm pour
l'axe de rotation (trait vert). Dans ce trou je viendrai fixer le tube
vertical qui servira de pivot de grue. Le problème essentiel c'est de
rendre la
liaison démontable. Pas gagné c't'histoire !
L'axe du moteur M1 peut éventuellement entraîner une courroie.... mais
le rayon très faible et l'entre-axes seront problématiques. On va le
constater plus tard.
La poulie
pour la rotation.... pas inspiré le gars... :
Avec ma sale manie de faire du "miséramodélisme", j'ai pas voulu
acheter de poulie pour coller sous l'embase. J'ai donc cherché un
"bidule" au bon diamètre... et j'ai trouvé mon bonheur dans la
pharmacie
de Madame : J'ai piqué une extrémité de tube de comprimés de ma chère
et tendre !
Je l'ai découpée et collée bien au centre de l'embase (l'extrémité de
tube, pas ma femme !).

Question coût, c'était bon mais le résultat n'est pas à conseiller : En
fait, moi qui me plaignais du contact laiton-Plastique initial... j'ai
pas obtenu mieux avec cette solution. Un fourreau de guidage en laiton
s'avèrera indispensable pour obtenir une liaison pivot correcte.
Et de toute façon, les poulies étaient trop proches, ce qui provoquait
un enroulement trop faible sur l'arbre moteur.

Résultat, ça glissait un peu trop bien... la grue coinçait sans
arrêt.
Donc, je casse tout et je recommence ! On verra ça un peu plus loin...
Du côté de la grue, j'ai dû tailler dans le vif : l'ergot situé sous le
corps de grue est à supprimer.

Il faut ensuite percer un trou de 5mm (je conseille d'utiliser un guide
ou un gabarit) pour y coller
un tube en laiton de 5mm extérieur.
Attention : Aucune partie du tube ne doit être obstruée.

Il faut être particulièrement vigilant à la perpendicularité de l'axe
pendant le séchage de la colle.
Le tube doit rentrer parfaitement dans le socle et
"le-bidule-qui-sert-de-poulie". Mais bon, le contact laiton-plastique n'est vraiment pas la bonne
solution. Pendant que je réfléchis à une autre option, je vais
m'occuper de l'alimentation de l'engin...
Les
palpeurs d'alimentation :
Bah oui...les moteurs et le cadre bougent.... et ils peuvent faire
plusieurs tours.
Donc il est impensable d'amener le courant avec des fils "en l'air". Je dois
confectionner des palpeurs et des pistes circulaires d'alimentation.
La piste circulaire est issue d'un circuit imprimé. Je perce un trou de
6mm, je mets une vis M6 dedans, je la maintiens dans un mandrin que je
fais tourner pendant que j'usine le circuit à la dremel.

Le résultat est très correct compte tenu de l'outillage...

J'y ai soudé deux fils. Le fil bleu passe par dessous, dans une rainure
radiale.
Du coté du circuit imprimé, voici ce que ça donne : Les palpeurs
sont constitués d'un tube en laiton de 3mm (2mm intérieur)
dans lesquels je fais coulisser des mines de crayon en guise de
charbons (voir l'article LOCOREVUE n°832).

L'effort d'appui des charbons est obtenu par des tiges de
corde à piano de diamètre 0.3mm que je soude à une extrémité contre le
circuit imprimé.

J'aurais prendre le machin plus efficace en plaçant les palpeurs de façon plus symétrique par rapport à l'axe de rotation.
Je précise que j'ai fait le choix d'alimenter la grue en DCC. Si vous
souhaitez commander vos moteurs en analogique, il faudra 4 pistes (2
par moteur) afin de les commander séparément (voire même simultanément
pour les plus adroits d'entre-vous).
Et pour controler tout ça ?
En ce qui me concerne, ce sera assez facile ! La grue sera contrôlée par la centrale, exactement come une
locomotive. J'y fixe donc un décodeur de loco.
Le choix du mouvement contrôlé se fera en activant les
fonctions F1 ou F2.

Deux relais monostables (disponibles ici à 0.72€ pièce ) sont commandés
par le
décodeur de la grue et conduisent le courant à l'un ou l'autre des
moteurs..
Tous ces éléments sont fixés sur un circuit imprimé dont voici le typon
:

On y reconnaît facilement :
- Le support de décodeur 21 broches en bas (dispo ici mais en réalité 20 broches car la 11°
est inutile)
- Les 2 relais disposés de chaque coté du moteur M2, sur le coté sans
cuivre.
- Les bornes moteurs M1+/- et M2+/-
- les bornes d'alimentation DCC+ / DCC- qui reçoivent les palpeurs.
Voici le circuit en place contre le cadre initial :

Les moteurs sont reliés au bornes du circuit par l'intermédiaire de
fils laiton (petites chutes qui traînaient sur la table...)
Lorsque l'assemblage est réalisé, c'est un peu la crise du logement
sous le socle de grue :

La soudure de l'axe sur le support est quasi impossible, ce qui
n'arrange rien.
Ca fait beaucoup de problèmes pour une seule liaison... alors zou ! je casse le pivot et je recommence !
Un axe de
rotation bien amélioré ! :
Maintenant que la commande fonctionne, il serait temps d'améliorer le
guidage et la transmission :
Je l'ai évoqué plus haut, la solution de la liaison pivot avec poulie pour la rotation de la grue
n'était franchement pas bonne. Ca coinçait et le guigage était... nul.
Il faut bien le dire.
A bien y réfléchir, ce qu'il me fallait c'est une liaison stable
qui ne glisse
pas.... ==> des tubes avec des engrenages quoi !...

Zou ! Je me procure un tube de 6mm*0.5, des réducteurs à
deux balles et je mets en place la nouvelle liaison :
Le tube est collé dans le trou du socle (préalablement percé à 6mm).
J'ai utilisé une couche de colle blanche plus que généreuse.

Remarquez que j'ai aussi collé des vis M2x16 pour la fixation à la
table. Si vous avez plus long, c'est mieux !
Sur l'axe de 6mm je colle (encore !) une roue dentée de 50 dents,
module 0,5mm (donc diamètre nominal=25mm)
Le seul impératif à respecter c'est la distance entre les axes : elle
doit être TRES précise. Sinon les roues ne se touchent pas, ou frottent
trop fort l'une contre l'autre. Dans mon cas précis, les roues ont 50
dents et 10 dents, pour un module de 0.5mm.
Ca donne un entre-axes de
(50*0.5 + 10*0.5) /2 = 15mm.
Argh ! Mon trou initial est à 18mm de l'axe moteur.... çô vô pô l'faire ! Je
confectionne donc une petite plaque en circuit imprimé qui permet de
relier le pignon moteur avec la roue fixe.

La position du moteur a donc changé mais c'est mieux ainsi car il est
plus près du centre ( = moins près des bords...
).
Etape délicate : Je soude cette plaque sur le tube de 5mm qui est relié à la grue (qui, lui-même, passe à l'intérieur du tube de 6mm).
ATTENTION à ne SURTOUT pas trop
chauffer ! Y'a du plastique partout
autour !
Le résultat est TRES satisfaisant !
Comment
faire tourner le tambour apparent ? :
Bon...puisque je n'enroule pas vraiment la chaîne autour du tambour
visible, celui-ci a du mal à tourner. Il serait pourtant souhaitable
qu'il suive le mouvement de la chaîne.
Pour cela, on obéït à la même loi que pour les poulies-courroies : T/t=efa => "La force transmise
augmente de façon exponentielle avec le frottement et l'angle d'enroulement". Ne pouvant augmenter le frottement, on a donc
tout intérêt à augmenter l'angle.
J'ai donc fait en sorte que la chaîne s'enroule le plus possible autour
de son axe. (voir schéma plus haut).
Pour cela, j'ai créé un axe supplémentaire, caché dans le corps de la
grue. Il permet aussi d'aligner la chaîne avec le tube vertical, ce qui
facilite l'entrée de la chaîne dans le tube.
J'enlève donc temporairement les deux tambours et je perce au diamètre
2mm de part en part.

L'axe est constitué d'une tige en laiton de 2mm, d'une poulie de 4mm (repercée à 2.05mm) et de 2
entretoises de 4mm.

L'ensemble est coincé entre les parois du corps. Les deux tambours
cachent les extrémités du fil laiton.
L'efficacité de cet enroulement supplémentaire est formidable. Le
tambour suit bien le mouvement (voir vidéo). Il ne manque plus
que le mécano qui s'accroche à la manivelle ! Tous les copains du club m'en parlent...je vais finir par craquer !
Un lest ne
serait pas inutile :
Bon, soyons clairs... on est au 1/87° donc le crochet en plastique est
bien trop léger pour espérer descendre tout-seul. J'ai conc
confectionné un crochet en plomb auquel j'ai accroché une charge (un
tuyau rempli de plomb, voir les photos suivantes).
Le tuyau est en laiton de 6mm, par 35mm de
long. Le plomb provient de plombs de pêche. Il a été martelé en place,
à l'intérieur du tube pour
occuper toute la place disponible.
Et comment
je la fixe sur le réseau ?
Facile : Avec une scie cloche je réalise un beau trou de 50mm de
diamètre à l'endroit exact où la grue doit être placée.

Pour obtenir un trou propre, je termine le perçage par le dessous.

Je mets en place une plateforme sur laquelle viendront des caisses,
tuyaux et autres charges diverses :

Sur un coté, je perce deux trous de 2mm côte à côte pour les fils
électriques. Je perce aussi deux trous pour les deux vis M2 de chaque
coté. J'insère
la grue par dessus, j'ajoute les écrous et je serre modérément.
Les
puristes mettront une goutte de colle à bois pour les freiner.

Les puristes (encore eux) veilleront à ce que la grue soit bien raccordée avec le sol....
Je relie les deux fils à l'alimentation DCC la plus proche et le tour
est joué !
Il n'y a plus qu'à se munir de votre smartphone préféré pour prendre le contrôle de la bête !

Que du bonheur !
Et la
vidéo ?
Elle est faite ! Merci à Philippe et Christian pour le coup de main précieux Vous y verrez la
grue vue de dessus puis la même vue de dessous.
Le lien direct vers la vidéo est ici : Grue de quai JOUEF motorisée reseau ACMF
Et voilà ! c'est fait ! Nul doute qu'elle aura son petit succès en expo ! Pour ma part, je suis comme un gamin...
ET SI ON FAISAIT ENCORE MIEUX ?
Cette grue fonctionne... mais c'est un prototype ! Après coup, je me
suis rendu compte que certains assemblages n'étaient vraiment pas au
top.
Je poursuis donc mes atermoiements et je vous propose une version améliorée :
Le principe reste le même mais j'ai optimisé les
dimensions des platines et j'ai fait en sorte d'équilibrer les efforts.
Le moteur pour la rotation est directement intégré sur la platine
supérieure du carter mobile. Evidemment, le typon est modifié, il
suffit de cliquer dessus pour télécherger le typon directement
imprimable.
Voici quelques vues du résultat sous SolidWorks :
Commençons par quelques vues générales :



Voici quelques vues en plan :


Et évidemment, ça ne serait pas complet sans les dessins de définition des éléments principaux :
D'abord, la platine électronique principale. Un clic sur l'image vous permettra de télécharger le typon directement imprimable.

Les deux flancs latéraux sont identiques :

La plaque qui porte le moteur supérieur est facile à réaliser. Les éléments en biais sont facultatifs.

La piste circulaire est assez simple à obtenir en suivant les
indications écrites plus haut. Evidemment, vous pouvez aussi opter pour
un connecteur Jack situé en bas de votre bâti mobile.... c'est encore
plus simple !

Et enfin, les dernières pièces un peu délicates : les guides des charbons !

Et si on faisait "encore plus" mieux?..
Bon c'est bien joli tous ces bricolages, mais on pourrait passer à une solution plus pro...non?
Je me suis repenché sur la grue et j'ai imaginé une solution à partir
de pièces prototypées. La cinématique reste identique mais les pièces
n'ont vraiment rien à voir avec le dessin initial.
J'ai même simplifié l'alimentation : Exit la grande plaque circulaire
en circuit imprimé ! Désormais, c'est un connecteur Jack mono en 3.5mm
de diamètre qui amène le DCC. Il est placé de façon coaxiale avec l'axe
de rotation de la grue. Un simple fil avec un connecteur Jack est
suffisant.

On retrouve les deux énormes relais (tiens voilà encore une amélioration à envisager
), les deux motoréducteurs, la courroie en boyau de vélo et le décodeur à 21 broches.
- La poulie rose sert à entraîner l'axe d'enroulement de la chaîne.
- Le coulisseau gris maintient l'axe rose et coulisse le long du corps
bleu. Il permet de tendre la "courroie" à l'aide d'une vis intégrée dans
le coulisseau. Ca paraît idiot mais c'est super pratique pour ajuster
l'effort maximum de traction sur la chaîne.
- Le moteur vertical permet d'entraîner la rotation de la grue. Tous
les pignons sont prototypés. La grande roue est fixée sous le socle.
Elle est centrée dans le trou de passage du bâti mobile.
Voici le sous-ensemble mobile qui porte les deux moteurs et le circuit imprimé.:

Pour relier le bâti mobile et le corps de grue, j'ai conçu
un pivot qui se centre au travers de la grande roue dentée. En dessous,
une vis permet de fixer solidement l'ensemble des pièces du
sous-ensemble mobile.

J'ai donc prototypé l'ensemble avec ma nouvelle machine de prototypage en résine :
Les premiers essais n'ont pas été super concluants...

...mais j'ai vite réussi à trouver les bons réglages pour obtenir ceci :

Il ne me reste plus qu'à fabriquer le circuit imprimé et à brancher tout ceci au club.... après le confinement.!
Donc la suite dès que possible !
